Des prévisions météorologiques et climatiques plus précises

Des scientifiques de l’EPFL et de l’Institut pour l’étude de la neige et des avalanches SLF-WSL ont réussi à rendre plus précis le modèle climatique le plus utilisé dans le monde en y intégrant des phénomènes en surface ignorés jusqu’ici.
Image prise par les scientifiques de CRYOS en Antarctique oriental. © Hendrik Huwald / CRYOS

Modéliser avec exactitude les précipitations neigeuses est devenu crucial dans le contexte du changement climatique et de la transition énergétique. Cependant, les modèles météorologiques et climatiques actuels n’intègrent pas encore certains aspects de la neige et manquent donc de précision. Par exemple, ils ne tiennent compte que d’une seule couche de neige, alors que chaque précipitation crée une couche de neige séparée avec des propriétés distinctes.

En Suisse, des scientifiques de l’EPFL et de l’Institut pour l’étude de la neige et des avalanches SLF-WSL développent depuis plus de 20 ans un logiciel qui permet de modéliser des événements neigeux complexes. Parmi eux se trouvent par exemple l’effet albédo, qui mesure le réfléchissement de la neige, la sublimation, qui survient lorsque le manteau neigeux passe directement de la glace à la vapeur au contact de l’air sec, l’effet isolant de la neige, les nuages de poudre dérivant en surface ou, encore, la neige soufflée près du sol. Nommé SNOWPACK, cet outil de modélisation sophistiqué est aujourd’hui largement utilisé dans le monde pour prédire par exemple les avalanches et évaluer les ressources en eau présentes et futures contenues dans la neige.

Prévisions améliorées

En intégrant l’outil SNOWPACK à l’un des logiciels de modélisation climatique le plus couramment utilisé dans le monde, le Weather Research and Forecasting model (WRF), les scientifiques de l’EPFL et du SLF ont réussi à améliorer la précision des prévisions du bilan de masse de la neige de 10% à 20% en moyenne et montré que la sublimation était très probablement plus élevée que ce qui a été modélisé jusqu’ici. Les scientifiques ont testé leurs résultats dans trois contextes différents, deux en Antarctique et un dans les Alpes suisses.

Les résultats de cette recherche viennent de paraître dans la revue Geoscientific Model Development et pourraient être appliqués dans les modèles climatiques globaux à l’avenir. En attendant, MéteoSuisse prévoit d'ajouter des caractéristiques de ce modèle, baptisé CRYOWRF, à ICON, son propre modèle de prévision météorologique. «Nous préparons la nouvelle génération de prévisions météorologiques», indique Michael Lehning, directeur du Laboratoire des sciences cryosphériques (CRYOS) au sein de la Faculté de l’environnement naturel, architectural et construit (ENAC), et auteur correspondant de l’étude.

De l’eau potable à l’électricité

Au niveau planétaire, la cryosphère désigne des régions de la Terre où la neige et la glace couvrent la surface pendant une longue période au cours de l'année. Son étude est cruciale, car la cryosphère influence le bilan énergétique et hydrique du système terrestre. Quelque 80% de l'eau douce de la Terre est contenue dans la cryosphère. L'Antarctique en représente le plus grand réservoir, avec 90% de la masse de glace d'eau douce. À l'échelle régionale, et notamment en Suisse, la dynamique de la couverture neigeuse joue un rôle important pour évaluer les ressources en eau destinées à l'agriculture et à l'hydroélectricité. La phase de fonte du manteau neigeux doit aussi être suivie de près, afin de prévenir les inondations et les glissements de terrain. Dans les pays tels que la Suisse, où l'industrie du ski est bien développée, la modélisation de la neige est largement utilisée pour guider la planification et la gestion des équipements de ski et, surtout, pour prédire les avalanches.