Unique et exceptionnel

Mike Seidel dirige la division Grandes installations de recherche au PSI. Il connaît les cinq installations comme sa poche, notamment leurs accélérateurs de particules.
Mike Seidel, responsable de la division Grandes installations de recherche au PSI (Illustration: Bruno Muff)

Mike Seidel, à la base, vous aviez étudié la physique nucléaire, mais en 2012, le PSI a mis son seul réacteur de recherche à l’arrêt. Alors que faites-vous ici?

Mike Seidel: L’énergie nucléaire n’est qu’une application de la physique nucléaire. Celle-ci porte sur les noyaux atomiques en général, qui sont composés de neutrons et de protons. Pour faire de la physique nucléaire, ou encore de la physique des particules, il faut des accélérateurs de particules et c’est ainsi que je suis venu à la physique des accélérateurs. Ma division est responsable de l’exploitation et du développement des différents accélérateurs du PSI.

Est-ce chacune des cinq grandes installations de recherche du PSI possède son propre accélérateur de particules?

La SLS et le SwissFEL ont chacun leur propre accélérateur. La SLS est un synchrotron, elle possède donc un accélérateur en forme d’anneau qui amène les électrons à une vitesse proche de celle de la lumière; ces derniers émettent alors de la lumière de type rayons X qui est utilisée aux différentes stations expérimentales pour les analyses très diverses. Au SwissFEL, on accélère aussi des électrons dans le même but, mais sur une trajectoire rectiligne à l’aide d’un accélérateur linéaire, abrégé Linac. Par ailleurs, nous avons aussi au PSI notre installation HIPA. Cet acronyme signifie «high intensity proton accelerator»: à cette installation, ce sont des protons qui sont accélérés dans des cyclotrons. Ils sont ensuite utilisés pour produire de manière ciblée des neutrons et des muons, qui sont destinés aux grandes installations de recherche SINQ, SµS et CHRISP. L’un dans l’autre, notre division gère donc trois grands accélérateurs auxquels sont couplées les cinq grandes installations de recherche. A tout cela vient encore s’ajouter l’installation PROSCAN, qui met à disposition les faisceaux de protons pour le traitement du cancer.

Et chacun de ces trois accélérateurs est unique au monde?

Oui, chacun d’eux est unique en son genre. Mais ce qui est vraiment exceptionnel, c’est aussi le fait qu’au PSI, nous ayons les deux types d’installations, qui permettent d’accélérer des électrons et des protons. De nombreux instituts dans le monde se concentrent sur un seul type d’accélérateur. Car les électrons et les protons se comportent de manière extrêmement différente dans les accélérateurs. Cela vient du fait que les protons sont 2000 fois plus lourds que les électrons. Et contrairement à ces derniers, ils n’émettent pratiquement pas de rayonnement synchrotron. De fait, dans la pratique, les aimants de HIPA sont nettement plus grands que ceux de la SLS ou du SwissFEL. D’un autre côté, le vide que nécessite la SLS est d’une qualité 1000 fois supérieure à celui que nécessite HIPA.

N’est-ce pas difficile d’exploiter sur le même site des installations aussi différentes?

Les exigences diffèrent, mais sur le fond, par bien des aspects, la technologie est similaire. Nous utilisons partout des aimants pour guider les particules et des systèmes à haute fréquence pour les accélérer. Pour toutes les installations, nous avons également besoin de technologie du vide et de systèmes de contrôle, mais aussi de calculs pour modéliser le comportement des particules accélérées.

Cette situation présente donc aussi des avantages?

Oui, nous créons des synergies. Nous avons ainsi une section générale Vide. Et une section Aimants, qui est capable de gérer aussi bien des aimants de la taille de la paume de la main que des aimants de la taille d’un éléphant. Nous avons une salle de contrôle commune pour tous les accélérateurs. De routine, l’exploitation dans cette salle est largement automatisée. Mais pour l’optimisation, les opératrices et opérateurs doivent être au bénéfice de connaissances extrêmement détaillées, par exemple pour identifier la cause en cas de problème et aider à remettre l’installation en état de marche.

Le travail dans votre division n’est donc jamais monotone?

Non, je ne crois pas. En Suisse, nous sommes le seul institut national avec ce type d’installations. Nous les mettons à disposition des chercheurs helvétiques et internationaux. Améliorer continuellement l’exploitation complexe et l’élargir avec de nouvelles possibilités d’application, cela représente un défi permanent pour nous. Il y a sans cesse de nouvelles expériences qui, vraiment, ne peuvent être menées que chez nous. Et cela, c’est une donne qui ne perd jamais de son attrait.