Imprimerie: quand le noir devient transparent

Des chercheurs de l’EPFL ont mis au point une nouvelle technique d’impression : enlever de la matière plutôt que d’en ajouter. Ce procédé pourra se révéler utile dans l’impression de billets de banque ou de documents d’identité.
Olivier Martin © Alain Herzog 2022 EPFL

« On renverse le concept d’impression de Guttenberg pour développer une technique totalement nouvelle. » Olivier Martin, professeur et directeur du laboratoire de nanophotonique et métrologie à la faculté des sciences et techniques de l’ingénieur, présente fièrement l’échantillon de sa méthode d’impression inédite : une plaque avec le logo de l’EPFL. Les lettres sont transparentes alors que les pourtours apparaissent noirs ou couleur aluminium. L’idée initiale ? Fabriquer un matériau qui absorbe parfaitement la lumière. Les chercheurs du laboratoire ont conçu un matériau constitué de trois éléments formant des couches distinctes. La première est de l’aluminium, la seconde, un composant diélectrique appelé fluor de magnésium et du chrome forme la troisième couche. Chaque strate ne mesure que quelques nanomètres d’épaisseur. Finalement, cela donne une plaque noire absorbante de lumière. « La couleur noire reste difficile à obtenir. Soit elle est bleutée, soit elle est violacée. Dans notre cas, le noir se révèle parfaitement noir. Cela signifie que le matériau créé se montre capable de capter 100 % de la lumière », explique Olivier Martin.

Le miroir parfait

Sebastian Mader, doctorant responsable du projet, s’est alors demandé ce qu’il se passerait s’il enlevait la première couche de matière, soit celle de chrome. « Il ne reste que l’aluminium et le diélectrique. Les deux forment un miroir parfait. L’absorption de la lumière se trouve nulle et le matériau réfléchit toutes les longueurs d’onde », relève le scientifique. Enfin, si les deux autres strates sont ôtées, il ne subsiste que la vitre en plexiglas qui sert de support. « On obtient alors de la transparence », ajoute le chercheur.

© 2022 EPFL

Créer de la transparence

Pour éliminer les différentes couches, les scientifiques ont utilisé un laser. Ce dernier s’avère si précis qu’il est possible de n’enlever qu’une partie des couches afin de jouer avec toute une gamme de nuances entre le noir et le transparent. « Plus le laser reste à un même endroit, plus il retire de la matière. On crée de la transparence au lieu de produire de la couleur », relève Olivier Martin. Cette nouvelle technique d’impression pourra se révéler intéressante dans le domaine de la sécurité et de l’impression de billet de banque. « Le contraste reste important pour les yeux. Avec le noir parfait et la transparence, nous pouvons vraiment écrire avec beaucoup de contraste. Par exemple, des lettres blanches sur du fond noir se lisent très bien », conclut l’ingénieur. Cette recherche est publiée dans la revue scientifique Light: Advanced Manufacturing.