Une équipe de l'EPFL découvre des milliers de nœuds transformables

En s’appuyant sur les résultats de la théorie des nœuds et en utilisant la simulation physique, des chercheuses et chercheurs de la Faculté informatique et communications (IC) ont créé un ensemble de données constitué de milliers de nœuds élastiques différents qui peuvent servir à la conception de nouvelles structures.
Elastic knot forms © Michele Vidulis / EPFL 2023

Les nœuds sont utilisés quotidiennement dans les applications les plus diverses. Ils assurent la sécurité lors des activités en intérieur et de plein air telles que la navigation de plaisance ou la voile. Ils servent de sutures chirurgicales ou de décorations. On les trouve même à des échelles nanométriques dans la nature, par exemple dans les molécules d’ADN.

Les nœuds élastiques sont ceux qui, en l’absence de frottement, reprennent leur forme initiale. Il existe des nœuds élastiques ouverts, noués avec une seule longueur de fil à deux extrémités, qui redeviennent droits, et des nœuds élastiques fermés, dans lesquels les extrémités du fil utilisé pour les nouer ont été attachées l’une à l’autre. Ceux-ci ont tendance à reprendre une forme incurvée.

Dans leur étude sur les nœuds fermés, des chercheuses et chercheurs du Laboratoire d’informatique géométrique dirigé par le professeur Mark Pauly, avec des collègues du Canada et des États-Unis, ont découvert des milliers de nœuds transformables, dont trois nouvelles formes que le nœud en huit peut prendre, doublant ainsi le nombre de nœuds recensés à ce jour dans la littérature scientifique.

Pour réaliser ces découvertes, l’équipe a d’abord mis au point un pipeline informatique qui combine l’échantillonnage spatial aléatoire et la simulation physique pour trouver efficacement les états d’équilibre stables des nœuds élastiques. En s’appuyant sur les résultats de la théorie des nœuds, ils ont testé leur pipeline sur des milliers de types de nœuds topologiques différents afin de créer un vaste ensemble de données sur les nœuds multistables.

«En appliquant une série de filtres à ces données, nous avons découvert des nœuds transformables présentant des propriétés physiques intéressantes et de belles formes géométriques», explique Michele Vidulis, assistant-doctorant et principal auteur de l’article Computational Exploration of Multistable Elastic Knots.

«Nous voulons explorer la conception de structures autodéployables et envisageons de coupler des tiges élastiques avec des matériaux en tissu.»      Michele Vidulis, auteur principal de l'étude

«Ce riche ensemble de formes fascinantes peut être créé simplement en nouant un fil élastique. Nous avons remarqué que ces objets à première vue simples peuvent parfois présenter des dizaines, voire des centaines de formes stables différentes. Les nouveaux motifs géométriques que nous avons identifiés étaient parfois surprenants. Par exemple, nous avons observé que la plupart des formes préférées des nœuds élastiques sont plates, alors que peu d’entre elles prennent des formes tridimensionnelles», poursuit Michele Vidulis.

L’équipe a réalisé une analyse approfondie des types de nœuds qui a révélé de nouveaux modèles géométriques et topologiques avec des principes de construction jamais observés dans les types de nœuds précédemment répertoriés. Cela montre comment les nœuds élastiques multistables peuvent être utilisés pour concevoir de nouvelles structures.

«Grâce à nos recherches, nous pouvons constater que les nœuds élastiques sont utilisés dans le processus de conception de structures autodéployables comme les tentes instantanées ou les abris d’urgence légers. Il est possible de concevoir de nouveaux métamatériaux combinant plusieurs éléments élastiques noués pour créer un réseau au comportement mécanique complexe», explique Michele Vidulis.

L’équipe a également créé des énigmes ludiques et attrayantes. L’un de ses défis a été de déformer un nœud élastique et de trouver manuellement certaines des formes géométriques intéressantes que les chercheuses et chercheurs ont calculées avec leurs algorithmes.

Aussi satisfaisantes ces découvertes soient-elles, Michele Vidulis et l’équipe estiment que ces travaux ouvrent la voie à d’autres pistes de recherche potentielles. «Nous voulons explorer la conception de structures autodéployables et envisageons de coupler des tiges élastiques avec des matériaux en tissu. Aussi, malgré la simulation de milliers de nœuds différents, notre étude n’a fait qu’effleurer la surface des millions de nœuds connus. Nous prévoyons également d’étudier des ensembles plus complexes de systèmes noués, dans lesquels la manière dont les composants individuels sont imbriqués les uns dans les autres pourrait mettre en évidence de nouvelles propriétés mécaniques», conclut-il.