Les lombrics stockent moins de carbone par temps sec

Les vers de terre et autres animaux qui dégradent les feuilles dans le sol forestier souffriront si les périodes de sécheresse deviennent plus fréquentes en raison du changement climatique. Cela aura des répercussions sur le stockage du carbone, comme le montre une étude de l'Institut de recherches sur la forêt, la neige et le paysage WSL.
Les vers de terre jouent un rôle central dans l'écosystème. Mais si la sécheresse persiste, ils seront de moins en moins nombreux dans le sol. (Photo: Marco Walser, WSL)

Les organismes du sol, en particulier les vers de terre, décomposent les feuilles et autres matières mortes, ce qui libère des nutriments et fertilise le sol. Ils stockent aussi du carbone dans le sol, contribuant ainsi à lutter contre le changement climatique. Mais en cas de sécheresse, lombrics, cloportes et compagnie se retirent dans les couches profondes du sol ou entrent en léthargie.

Une équipe de recherche dirigée par le WSL vient d'étudier l'impact du manque d'eau en forêt sur ces processus – du moins indirectement. Dans le Bois de Finges, en Valais, les scientifiques ont relevé l'abondance de la faune du sol, la décomposition de la matière organique et le stockage du carbone. Une expérience de longue durée du WSL qui est menée dans cette pinède depuis 2003 leur a offert une plate-forme unique: une partie des parcelles forestières est irriguée artificiellement en été, tandis que le reste du site est exposé à la sécheresse naturelle.

Le manque d'eau inhibe la faune du sol

Les vers de terre étaient beaucoup plus nombreux sur les placettes irriguées que sur les placettes non irriguées. Les animaux plus petits tels que les collemboles et les cloportes, qui sont également d'une grande importance pour la décomposition des feuilles mortes, étaient également beaucoup plus nombreux sur les parcelles irriguées. En conséquence, la matière organique décomposée dans le sol était également plus abondante. Les scientifiques l'ont démontré en enterrant des feuilles mortes dans de petits filets aux mailles plus ou moins larges, qui laissaient passer les animaux en fonction de leur taille.

Dans la perspective du changement climatique, ce constat est important, car si les animaux du sol se nourrissent abondamment, ils fixent finalement le carbone du CO2 atmosphérique dans l'humus du sol, où il est alors stocké sur de longues périodes. «Si les sols forestiers deviennent trop secs, l'abondance de la faune du sol et son activité sont réduites, et les forêts peuvent absorber moins de carbone à long terme », explique Frank Hagedorn, responsable de l'étude et chef du groupe Biogéochimie au WSL. En Suisse et dans toute l'Europe, les sols secs contiennent nettement moins de carbone que les sols humides. «Notre étude a montré que la faune du sol joue un rôle important.» En d'autres termes, les vers de terre, cloportes et autres sont responsables du fait que les sols secs contiennent moins d'humus et sont moins fertiles. Ils sont les plus sensibles à la sécheresse, plus encore que les champignons ou les micro-organismes.

Frank Hagedorn se dit surpris de la rapidité avec laquelle les différences se sont fait sentir.  «L'humus se forme sur des centaines ou des milliers d'années. Nous ne nous attendions pas à constater des différences dans le carbone stocké après à peine dix ans.» L'étude démontre l'importance de la faune du sol dans le cycle du carbone dans les forêts. À l'avenir, il faudra leur accorder plus d'attention dans les programmes de suivi à long terme de la forêt et dans les études sur le changement climatique.