Prochain objectif : zéro émission nette

Que font les institutions du Domaine des EPF pour réduire les émissions de CO2 de leurs bâtiments ? De l'anergie à la chaleur résiduelle en passant par le chauffage à distance ou encore le photovoltaïque, de nombreuses mesures sont prises aux quatre coins de la Suisse. 
Opérationnelle depuis peu et bientôt raccordée à un immense data center, la centrale de chauffe à l'EPFL permet au campus d’Ecublens d’optimiser sa production et consommation d’énergie en vue d’atteindre la neutralité carbone. (© 2021 Niels Ackermann/Lundi13)

Les bâtiments à eux seuls sont responsables d'environ un quart des émissions de CO2 en Suisse. Si nous voulons atteindre l'objectif de 1,5°C fixé par l'accord de Paris sur le climat, ces émissions doivent diminuer de manière drastique. Les institutions du Domaine des EPF en sont pleinement conscientes. C'est pourquoi elles étudient, développent et mettent en pratique des concepts énergétiques modernes.

Sur le campus de l’ETH Zurich Hönggerberg, 14 bâtiments sont déjà raccordés au «réseau d'anergie», sept autres devraient suivre au cours des deux prochaines années. «L'anergie chauffe et refroidit à un niveau de température bas. Cela peut sembler inhabituel, mais ce n'est pas une technologie de fusée», explique Wolfgang Seifert, responsable de l'énergie à l'ETH Zurich. En hiver, la chaleur est extraite du sol à une température de 18°C à une profondeur de 200 mètres. Les pompes à chaleur augmentent ensuite la température à environ 34°C. «C'est ainsi que nous chauffons. Pour que cela fonctionne, il faut bien sûr des installations avec un très bon rendement et des bâtiments spécialement conçus pour cela.» Au Hönggerberg, l'approvisionnement en énergie analogue est standard pour les nouvelles constructions ; les anciens bâtiments sont rénovés de manière à pouvoir également être raccordés au réseau.

C'est le cas de la tour de physique, qui a reçu la certification Minergie. «En hiver, nous chauffons avec l'énergie que nous obtenons gratuitement de la terre. En été, nous dirigeons la chaleur excédentaire vers le sol et refroidissons ainsi les bâtiments.» En 2006, l'ETH Zurich s'est fixé pour objectif de réduire les émissions de CO2 des bâtiments de 50 % d'ici 2020. Wolfgang Seifert et son équipe ont dépassé cet objectif et ont reçu pour cela le prix de l'énergie Watt d'Or. «Actuellement, nous planifions comment arriver le plus rapidement possible au zéro émission nette.»

Accumulation de chaleur résiduelle dans le sol

A l’EPFL, l'approvisionnement en chaleur a également beaucoup évolué. Sa nouvelle centrale de chauffe, qui a été achevée en 2021, dispose de pompes à chaleur plus performantes que ses prédécesseurs et est couplé avec un système qui valorise les rejets thermiques d’un data center situé dans le même bâtiment. En outre, les façades et le toit sont entièrement recouverts de capteurs solaires. Depuis 1986 déjà, le chauffage et le refroidissement reposent en grande partie sur l'eau du lac Léman. «Nous la prélevons à une température constante de sept degrés et la réchauffons à environ 50°C à l'aide des pompes à chaleur. Nous exploitons ainsi la station de pompage commune de l'EPFL et de l'Université de Lausanne», explique David Gremaud, responsable du groupe Energies.

Son collègue Gianluca Paglia ajoute : «Bientôt, nous utiliserons aussi la chaleur résiduelle des serveurs. Pour ce faire, de l'eau sera acheminée à travers les portes spécialement conçues des racks d'ordinateurs. Ainsi, les serveurs seront refroidis et l'eau chauffée.» Une zone pilote pour des expériences scientifiques est également prévue dans une partie du bâtiment. L'EPFL ne dépendra ainsi plus des énergies fossiles pour chauffer et refroidir ses bâtiments et d'autres projets sont déjà prévus pour l'avenir. «Nous disposons encore d'environ 15 000 m2 de toitures sur lesquelles nous pouvons installer des panneaux photovoltaïques», ajoute David Gremaud. «Ce projet fait partie intégrante de la stratégie énergétique de l'EPFL visant à réduire les émissions de CO2

L'Empa et l'Eawag sont installés sur un campus commun à Dübendorf. Un nouveau complexe de bâtiments y est actuellement en construction avec, en dessous, un réservoir de sondes géothermiques à haute température. Les sondes géothermiques s'enfoncent jusqu'à 100 mètres de profondeur. Au cours des prochaines années, les scientifiques étudieront directement sous leurs pieds comment améliorer encore ce système qui permet de chauffer l'ensemble du campus. «Nous utilisons la chaleur résiduelle des installations frigorifiques et des appareils de recherche», explique Hannes Pichler, responsable de l'immobilier à l'Empa (qui s'occupe également des immeubles de l'Eawag et du WSL). «En été, nous dirigeons cette chaleur perdue dans le sol via les sondes et 'chargeons' ainsi la 'batterie' pour l'hiver.»

En outre, l'Empa et l'Eawag exploitent également une centrale de cogénération au biogaz et produisent de l'électricité grâce à des installations photovoltaïques. Les données des différentes installations sont analysées en détail. Avec l'aide de la numérisation, elles devraient être encore optimisées dans les années à venir. «Il existe toujours un grand potentiel d'amélioration de l'efficacité», explique Hannes Pichler. «Le prochain objectif est le zéro émission nette. Nous souhaitons l'atteindre le plus rapidement possible.»

Davantage d'efficacité par portion d'énergie utilisée

«Bien sûr, nous avons nous aussi des installations photovoltaïques, des stations de recharge pour les voitures électriques, nous incitons nos collaboratrices et collaborateurs à venir en transports publics et nous sommes reliés à un réseau de chauffage urbain qui fonctionne avec les rejets thermiques», explique Marcel Hofer, responsable de l'énergie à l'Institut Paul Scherrer. «Notre plus grand défi n'est cependant pas du tout le chauffage ou la mobilité, mais nos grandes installations de recherche, très gourmandes en énergie. Nous avons besoin d'amplificateurs très puissants pour accélérer des pièces, d'électroaimants puissants pour diriger et concentrer les protons et les électrons ou encore d'hélium liquéfié à basse température pour régler la vitesse des neutrons. Aujourd'hui, nous tirons 100 % de l'énergie nécessaire de l'énergie hydraulique. Et la chaleur résiduelle que nous récupérons de nos installations couvre plus de la moitié de nos besoins en chaleur. Là où nous voyons encore le plus de potentiel, c'est dans l'amélioration de l'efficacité. Nous travaillons actuellement à l'augmentation de la brillance du faisceau d'électrons de notre source de lumière synchrotron suisse (SLS) d'un facteur 40. Cela signifie que nous pourrons alors réaliser des tomographies cent fois plus rapidement, tout en consommant environ 20 % d'énergie en moins. Etre plus efficace lorsque nous utilisons de l’énergie, tel est notre objectif.»

«Nous sommes pour ainsi dire neutres en termes de CO2 pour ce qui est du chauffage.»      Andreas Zurlinden, chargé de l'environnement et de la sécurité au WSL

L'Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage WSL est présent sur plusieurs sites. «A Birmensdorf, nous avons dernièrement rénové deux bâtiments datant des années 1950», raconte Andreas Zurlinden, chargé de l'environnement et de la sécurité. «Désormais, les bâtiments répondent aux normes Minergie-A et P Eco et l'ancien chauffage au mazout ne fonctionne plus que quelques jours par an, lorsque le ramoneur entretient le chauffage aux copeaux de bois. Sur le site de Davos, nous avons installé une pompe à chaleur qui prélève de la chaleur dans la nappe phréatique. Ainsi, tout compte fait, nous sommes pour ainsi dire neutres en termes de CO2 pour ce qui est du chauffage.»

Un nouveau bâtiment de remplacement est actuellement en construction à Davos, selon le standard SNBS Platine. Celui-ci va bien au-delà du label Minergie, plus connu. «Minergie concerne l'isolation et l'énergie, SNBS inclut également le processus de construction, les matériaux utilisés, la qualité des postes de travail pour le personnel, le raccordement aux transports publics et bien plus encore.» Pour un rapport récent, Andreas Zurlinden a fait appel à une auteure qui rédige régulièrement des rapports environnementaux pour des entreprises. «Elle a été très contente parce qu'elle a enfin pu écrire pour une institution qui ne voulait pas simplement un rapport dans lequel elle était bien placée, mais qui vivait réellement les valeurs du rapport environnemental.»