La canopée protège du réchauffement climatique

L’effet rafraîchissant de la couronne des arbres protège les organismes forestiers des températures extrêmes. Son impact est important pour l’adaptation au réchauffement climatique, comme le démontre une étude internationale sous la direction de l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage WSL, qui paraît aujourd’hui dans la revue spécialisée Science.
La canopée assure des conditions climatiques variables à petite échelle, essentielles pour la survie des organismes forestiers. Anémones dans le sous-bois. (Photo : Markus Bolliger)

Le climat sous le couvert forestier n’est pas le même qu’à l’extérieur. Vous l’avez bien sûr constaté lorsque vous aspirez à un peu de fraîcheur en forêt pendant les chaudes journées d’été. Cependant, dans les études scientifiques, « LE » réchauffement climatique est celui qui est mesuré par plusieurs milliers de stations météorologiques standardisées sur la planète. Généralement situées en terrain dégagé, celles-ci enregistrent la température à une hauteur de 1,5 à 2 mètres. Or, une grande partie des espèces terrestres à travers le monde vivent dans les forêts, souvent dans les sous-bois et aussi dans le sol, et ne sont qu’indirectement concernées par ces données climatiques en terrain découvert.

Aujourd’hui, une équipe de recherche internationale dirigée par le WSL et l’université de Cambridge a pour la première fois, sur la base de chiffres concrets, évalué le réchauffement climatique sous la canopée, et donc la différence avec ce qu’on constate en terrain découvert. Pour ceci, le groupe animé par Florian Zellweger du WSL a mesuré la température sur 100 sites en forêt et l’a combinée dans un modèle informatique avec des séries de données remontant parfois à 80 ans sur la densité de la canopée forestière. Celles-ci concernent près de 3000 placettes de programmes d’observation à long terme, dont 37 dans le Jura suisse.

Les chercheurs rapportent dans Science que les données mesurées en terrain dégagé ne reflètent pas correctement l’évolution de la température sous le couvert des feuillages. Si la canopée s’épaissit, elle freine le réchauffement climatique pour les organismes aux étages inférieurs, et si elle s’éclaircit, la température fait un bond. « Il est important de le savoir afin de comprendre les effets du changement climatique sur la biodiversité des forêts », explique Florian Zellweger.

Chaque organisme a une température optimale à laquelle il prospère. Lorsque le climat se réchauffe, les espèces amatrices de chaleur évincent celles qui sont adaptées au froid et qui peuvent par exemple se réfugier à des altitudes plus élevées. Cependant, la température optimale des organismes forestiers est nettement inférieure aux températures mesurées. Leur adaptation au climat est donc en retard. « De nombreuses espèces vivent dans une plage de température de plus en plus suboptimale dans le contexte du changement climatique global », explique Florian Zellweger.

Cela signifie qu’une diminution de la canopée protectrice, qu’elle soit d’origine naturelle ou humaine, entraîne un réchauffement supplémentaire et drastique pour les plantes qui poussent sous le couvert forestier, et qui y sont mal préparées. Soudain, leur emplacement, jusque-là frais, ombragé et généralement plus humide, se retrouve plus fréquemment et plus longtemps exposé à une chaleur de plomb, avec un sol qui s’assèche. De nombreuses espèces ne peuvent pas s’adapter assez rapidement, sont évincées par des espèces amatrices de chaleur, et peuvent disparaître localement. Compte tenu de l’augmentation prévue des vagues de chaleur estivales en Europe, la biodiversité forestière risque d’évoluer et de « mettre en difficulté certaines espèces », conclut Florian Zellweger. Les gestionnaires forestiers doivent donc prendre en compte l’impact des interventions sylvicoles sur les conditions climatiques à l’intérieur de la forêt et leur influence sur la biodiversité.

Contact

Dr. Florian Zellweger
Wissenschaftlicher Mitarbeiter
florian.zellweger(AT)wsl.ch
+41447392677
Eidg. Forschungsanstalt WSL
Zürcherstrasse 111
8903 Birmensdorf