La satisfaction professionnelle diminue avec la numérisation

Cette année, le Baromètre suisse des ressources humaines combine deux évolutions majeures: la numérisation et le vieillissement de notre société. Environ 40% des personnes interrogées s'imaginent travailler au-delà de l'âge légal de la retraite. L'étude montre que la satisfaction professionnelle diminue à mesure que la numérisation des tâches d'un·e employé·e augmente.

 
Dans un monde du travail numérisé, la responsabilité personnelle joue un rôle de plus en plus important. (Photo : Niek Verlaan / Pixabay)

Numérisation et surveillance électronique

Du point de vue des personnes interrogées, les employeurs suisses sont relativement ouverts aux nouvelles technologies. Plus de 74% des employé·e·s déclarent que leur employeur est prêt à utiliser des solutions numériques. Cependant, plus le niveau de numérisation est élevé dans l'entreprise, plus le niveau de satisfaction professionnelle est faible. Dans un environnement de travail numérisé, la responsabilité personnelle des employé·e·s joue un rôle de plus en plus important. D'une part, 66% des personnes interrogées déclarent être «pleinement» ou au moins «plutôt» habilitées par leurs supérieur·e·s à prendre des décisions de manière indépendante. D'autre part, les personnes interrogées font également état d'une surveillance électronique par les employeurs. Par exemple, 46% des personnes interrogées déclarent que leur employeur bloque l'accès à certains sites Internet, tandis que 22% sont surveillés lorsqu'ils visitent des sites Internet. Vingt pourcent des personnes interrogées indiquent qu'elles ont le sentiment que leur vie privée est restreinte en conséquence par leur employeur. Les résultats montrent que les employé·e·s se sentent moins connectés à leur entreprise si la surveillance électronique est trop souvent utilisée.

Les stéréotypes liés à l'âge et l'auto-efficacité numérique

En Suisse, les préjugés à l'encontre des salariés âgés dans les entreprises semblent être très répandus. Seulement un peu plus de 10% des salariés n'observent aucun préjugé négatif à l'égard des salariés plus âgés au travail. «Il y a ici un besoin considérable d'action pour les employeurs, mais aussi pour les cadres et les collègues», déclare la responsable de l'étude, Gudela Grote. Si les stéréotypes négatifs liés à l'âge prévalent, cela réduit l'auto-efficacité numérique des personnes concernées. En d'autres termes, les employés plus âgés ont tendance à avoir une moins bonne opinion de leurs propres compétences en matière de technologies numériques. Les préjugés à l'encontre des salariés plus âgés ont également un effet négatif sur la volonté de travailler au-delà de l'âge de la retraite. Les données du Baromètre suisse des ressources humaines montrent que plus de 40% des personnes interrogées peuvent s'imaginer travailler plus longtemps. Cette volonté peut être activement encouragée, par exemple, par le «mentorat inversé» - l'échange de salariés plus âgés avec des plus jeunes.

Distinction entre vie privée et vie professionnelle

Environ 75% des personnes interrogées préfèrent une séparation nette entre le travail et la vie privée. Ce constat est particulièrement important dans la situation actuelle, où de nombreuses personnes ont encore un accès limité à leur lieu de travail et oeuvrent donc depuis leur domicile. Le désir de séparation est encore plus prononcé chez les employé·e·s plus âgés. Dans le même temps, cependant, environ 60% des personnes interrogées déclarent que, dans la pratique, le travail et la vie privée sont mélangés. «Il est important que les employé·e·s ainsi que les supérieur·e·s et les responsables des ressources humaines veillent à ce qu'il y ait des règles claires, par exemple sur la disponibilité requise, qui permettent de tracer des frontières entre le travail et la vie privée», explique Bruno Staffelbach.

Tendances

Le Baromètre a également examiné les tendances générales de la gestion des ressources humaines et leurs effets. Il est surprenant de constater qu'en moyenne, le même degré d'insécurité de l'emploi est vécu qu'il y a deux ans. Cela est probablement dû au fait qu'au moment de l'enquête, les restrictions opérationnelles liées au coronavirus venaient seulement d'être mises en place. Des analyses détaillées montrent également qu'il existe de fortes différences entre les secteurs et que la précarité de l'emploi a augmenté notamment dans l'industrie hôtelière. Le fait que la satisfaction au travail ait augmenté et que les formes d'insatisfaction aient presque toutes diminué suggère également que les employé·e·s sont actuellement particulièrement soulagés d'avoir un emploi.

Dans l'ensemble, comme les années précédentes, le bilan de la gestion des ressources humaines est assez positif. Mais les faiblesses persistent également. L'autonomie et la participation devraient être davantage encouragées et le contrat psychologique devrait être plus équilibré, afin que les employé·e·s puissent se développer sous leur propre responsabilité et acquérir les compétences nécessaires pour soutenir la transformation numérique.

La onzième enquête du Baromètre suisse des ressources humaines repose sur un sondage représentatif de près de 2000 employé·e·s en Suisse alémanique, romande et italienne. L'enquête a débuté à la mi-mars 2020, lorsque l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a simultanément classé le Covid-19 comme une pandémie mondiale, suivie peu après par le semi-confinement en Suisse. Bien que l'enquête n'ait pas explicitement porté sur la pandémie de corona et son impact sur le monde du travail, les données doivent être interprétées dans ce contexte.

Le Baromètre suisse des ressources humaines

Le Baromètre suisse des ressources humaines enregistre la manière dont les employé·e·s en Suisse vivent leur situation professionnelle. Les sujets suivants, entre autres, sont étudiés: les attentes et les offres mutuelles des employé·e·s et des employeurs dans le cadre de la relation de travail (contrat psychologique), les pratiques de gestion des ressources humaines telles que la conception du travail et le développement du personnel, le leadership, la satisfaction professionnelle, l'employabilité et l'orientation professionnelle. L'étude est régulièrement publiée par Gudela Grote, professeur de psychologie industrielle et organisationnelle à l'ETH Zurich, et Bruno Staffelbach, directeur du Centre de gestion des ressources humaines de l'Université de Lucerne, en coopération avec l'Université de Zurich.

Le Baromètre RH 2020 est basé sur une enquête menée auprès de 1995 employé·e·s, sur la base du registre d'échantillons de l'Office fédéral de la statistique. Le présent numéro est consacré au thème principal «Numérisation et générations». L'enquête s'est déroulée entre mars et mai 2020 en Suisse alémanique, romande et italienne.

Le Baromètre RH 2020 a été réalisé avec le soutien du Fonds national suisse de la recherche scientifique.

Baromètre suisse des relations humaines