Améliorer la qualité microbienne de l’eau recyclée à Bengaluru

Dans les villes indiennes, les eaux usées traitées sont utilisées comme source d’eau alternative à cause du manque d’eau croissant. Une étude menée par l’Eawag en collaboration avec des partenaires indiens montre comment l’emploi de capteurs et la chloration automatique peuvent améliorer la qualité microbienne de l’eau dans les systèmes de recyclage des bâtiments et augmenter ainsi la sécurité de la population.
Dans la ville indienne de Bengaluru, plus de 3’000 petites stations d’épuration recyclent sur place les eaux usées des grands bâtiments d’habitation, qui doivent ensuite être réutilisées sur place. (Photo: Josianne Kollmann)

À Bengaluru, comme dans de nombreuses villes indiennes, la population a fortement augmenté ces dernières années, ce qui pousse l’infrastructure hydraulique à ses limites. Les autorités locales imposent donc depuis 2004 que toutes les eaux usées soient traitées sur place dans les grands bâtiments d’habitation. En outre, l’intégralité de l’eau traitée doit être réutilisée au sein du bâtiment. Il n’est pas permis d’évacuer l’eau ailleurs. À Bengaluru, plus de 3’000 petites stations d’épuration recyclent actuellement l’eau, utilisée principalement pour l’arrosage et la chasse d’eau des toilettes.

Néanmoins, il existe très peu d’informations sur les variations à court terme de la qualité microbienne de l’eau sortant de ces petites stations d’épuration, car la qualité de l’eau n’est mesurée en laboratoire qu’une seule fois par mois. Ceci peut s’avérer problématique, car des eaux usées insuffisamment traitées peuvent présenter un risque sanitaire pour les utilisatrices et les utilisateurs: les eaux usées ménagères contiennent en effet de fortes concentrations d’agents pathogènes. Les utilisatrices et les utilisateurs d’eau recyclée peuvent alors entrer en contact avec ces agents pathogènes, même sans boire cette eau. Lorsque cette eau recyclée n’est pas suffisamment traitée, des maladies peuvent également se transmettre en avalant ou en inhalant des quantités d’eau infimes. Les aérosols, soit de minuscules gouttes d’eau, se propagent par exemple lorsque l’on tire la chasse des toilettes ou que l’on arrose avec des gicleurs. Mais les maladies peuvent aussi se transmettre en touchant des surfaces entrées en contact avec l’eau traitée, par exemple les plantes arrosées avec l’eau recyclée.

Dans une étude récente, Eva Reynaert, doctorante au département Technologie des procédés de l’Institut de recherche sur l’eau Eawag, et Eberhard Morgenroth, responsable du département Technologie des procédés, ont analysé en collaboration avec l’Ashoka Trust for Research in Ecology and the Environment (ATREE) la qualité microbienne de l’eau des petites stations d’épuration de Bengaluru et étudié des stratégies pour l’améliorer.

L’étude montre qu’il existe des variations à court terme de la qualité microbienne de l’eau qui pourraient mettre en danger la santé des utilisatrices et des utilisateurs. Le traitement peut toutefois être optimisé et garantir la disponibilité d’une eau recyclée irréprochable sans avoir à apporter des modifications de grande ampleur aux stations d’épuration existantes. À cet effet, l’étude recommande les mesures suivantes:

1. Optimisation de l’épuration biologique des eaux usées afin d’obtenir une désinfection plus efficace par chloration:

L’eau est en règle générale désinfectée par l’ajout de chlore. L’efficacité de la chloration dépend néanmoins des étapes de traitement préalables, notamment de l’efficacité de l’élimination de l’ammonium – un composé azoté contenu dans les eaux usées – lors du traitement biologique des eaux usées. Si l’eau traitée contient encore de l’ammonium, celui-ci réagit immédiatement avec le chlore libre et peut consommer de grandes quantités du chlore ajouté. Ce dernier n’est alors plus disponible pour la désinfection. Étant donné que la ventilation est un paramètre décisif pour l’élimination de l’ammonium, les chercheuses et chercheurs recommandent donc d’optimiser celle-ci.

2. Emploi de capteurs et chloration automatique pour garantir en permanence une eau irréprochable

Dans la plupart des stations d’épuration de Bengaluru, le chlore n’est ajouté manuellement qu’au moment du remplissage des réservoirs d’eau, par exemple en actionnant une pompe de dosage. Cette approche ne tient pas compte des modifications de la qualité de l’eau d’alimentation, comme les variations de la concentration en ammonium. Outre l’optimisation du traitement biologique des eaux usées, les chercheuses et chercheurs recommandent aussi d’automatiser la chloration à l’aide de capteurs. Cela permettrait d’adapter la quantité de chlore ajoutée à la qualité de l’eau et d’éviter qu’il y ait trop ou trop peu de chlore dans l’eau. De plus, l’automatisation de la chloration contribuerait à empêcher la croissance de nouvelles bactéries dans l’eau traitée entre les chlorations.

Publication originale

Reynaert, E.; Nagappa, D.; Morgenroth, E. (2023) Using Sensors and Automated Chlorination to Improve the Microbial Water Quality of On-Site Sewage Treatment Plants in Bengaluru, Research Brief, DOI: https://doi.org/10.3929/ethz-b-000603755

Financement / Coopération

  • Eawag
  • Ashoka Trust for Research in Ecology and the Environment
  • ETH Zürich