Des protéines artificielles en guise de vaccin

Des scientifiques de l’EPFL ont développé une nouvelle approche informatique pour créer des protéines artificielles, dont les résultats in vivo, en tant que vaccins, s’avèrent prometteurs. Cette démarche ouvre la possibilité de concevoir des vaccins plus sûrs et plus efficaces.
© 2020 EPFL

Les vaccins sont l’une des interventions les plus efficaces pour prévenir la propagation des maladies. Ils incitent le système immunitaire à produire des anticorps qui nous protègent contre les infections. Cependant, nous manquons toujours de vaccins contre de nombreux agents pathogènes importants, tels que la grippe ou la dengue. « Quand les vaccins ne fonctionnent pas bien, on a tendance à penser que les anticorps ne remplissent pas leur mission protectrice. Le système immunitaire ne génère tout simplement pas le bon type d’anticorps », explique le professeur Bruno Correia. Dans le Laboratoire de conception de protéines et d’immuno-ingénierie de la Faculté des Sciences et Techniques de l’Ingénieur de l’EPFL, des scientifiques ont développé une stratégie pour concevoir des protéines artificielles qui indiquent très précisément au système immunitaire quels anticorps produire. L’étude est publiée dans la revue Science.

Construire des protéines comme des Lego

L’équipe de scientifiques a créé des protéines artificielles à l’aide de méthodes de calcul. « Elles n’existent pas dans la nature », précise Che Yang, étudiant en doctorat et co-auteur principal de l’étude. « Nous avons développé un algorithme de conception de protéines appelé TopoBuilder. Il permet de construire virtuellement des protéines comme si l’on associait des Lego. Assembler des protéines artificielles qui ont des fonctions nouvelles s’avère absolument fascinant », déclare Fabian Sesterhenn, doctorant et co-auteur principal.

Une maladie sans vaccin

Les chercheurs se sont concentrés sur la conception de protéines de novo qui peuvent aboutir à un vaccin contre le virus respiratoire syncytial (VRS). Le VRS provoque de graves infections pulmonaires et est l’une des principales causes d’hospitalisation des nourrissons et des personnes âgées. « Malgré plusieurs décennies de recherche, il n’existe toujours pas de vaccin ou de remède contre ce virus », explique Bruno Correia.

Les protéines artificielles ont été créées en laboratoire, puis testées sur des animaux. Elles ont déclenché la production d’anticorps spécifiques, par le système immunitaire, contre les points faibles du VRS. « Cette étude s’avère encourageante, car elle permettra de générer des vaccins beaucoup plus précis qui induiront une fabrication d’anticorps spécifiques en fonction de la maladie que l’on désire combattre. Il reste encore beaucoup à faire afin d’améliorer l’efficacité de ce vaccin. Notre recherche constitue une première étape vers cet objectif », explique le professeur.

Au-delà des immunogènes, la capacité de produire des protéines de novo élargira le paysage structurel et fonctionnel des protéines naturelles, qui peut être profitable dans de nombreux domaines de la biotechnologie. « Nous pouvons maintenant utiliser les outils de conception pour créer des protéines pour d’autres applications biomédicales telles que les médicaments à base de protéines ou les biomatériaux fonctionnalisés », conclut Fabian Sesterhenn.

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References

 F. Sesterhenn, C. Yang, J. Bonet, J. T. Cramer, X. Wen, Y. Wang, C. Chiang, L. A. Abriata, I. Kucharska, G. Castoro, S. S. Vollers, M. Galloux, E. Dheilly, S. Rosset, P. Corthésy, S. Georgeon, M. Villard, C. A. Richard, D. Descamps, T. Delgado, E. Oricchio, M. Rameix-Welti, V. Más, S. Ervin, J. F. Eléouët, S. Riffault, J. T. Bates, J. P. Julien, Y. Li, T. Jardetzky, T. Krey & B. E. Correia. De novo protein design enables the precise induction of RSV-neutralizing antibodies. Science