Le CO2 vu de l'espace

Les concentrations de CO2 dans l'air continuent d'augmenter rapidement, et une réduction rapide des émissions d'origine humaine devient essentielle. Afin d'évaluer l'efficacité des mesures politiques, il est nécessaire de disposer de mesures d'émission fiables et rapides. Toutefois, les méthodes actuelles sont coûteuses. L'Agence spatiale européenne ESA travaille donc au développement de nouveaux satellites qui pourront à l'avenir déterminer les émissions de CO2 - avec l'aide de l'Empa.
L'objectif de l'UE et de l'ESA est de détecter les émissions de CO2 en temps réel afin de pouvoir déterminer à l'avenir les émissions de gaz à effet de serre de manière fiable et rapide dans le monde entier. Photo: iStock

Les villes sont de véritables sources de CO2, mais il est difficile de déterminer de manière fiable la quantité d'émissions réelles en temps réel. Les estimations actuelles sont basées sur les statistiques et les données d'activité des transports, de l'industrie, du chauffage et de la production d'énergie. L'évaluation de ces données est complexe et les résultats ne sont pas disponibles en temps réel. Les estimations sont également incertaines, car il arrive souvent que des chiffres précis ne soient pas disponibles et que des hypothèses et des simplifications doivent être formulées - par exemple, dans le cas du chauffage. Bien que le réseau actuel de stations de mesure au sol soit utile pour suivre l'augmentation du CO2 dans l'atmosphère, il n'est actuellement pas assez dense pour fournir des informations fiables sur les émissions des différents pays ou même des différentes villes.

Des chercheurs travaillent à l'amélioration de la détermination des émissions

C'est pourquoi l'UE, en collaboration avec l'ESA, développe un système de surveillance des émissions de CO2. Un élément clé de cette mission est la mission de satellites CO2M ("Copernicus Anthropogenic Carbon Dioxide Monitoring") : à partir de 2025, les premiers satellites CO2M doivent être mis en orbite pour produire des cartes mondiales des concentrations atmosphériques de CO2 à l'aide de mesures spectroscopiques. Il sera ainsi possible de déterminer où et combien de CO2 est émis par les usines, les villes et les pays. Ces mesures permettraient de réduire les incertitudes actuelles dans l'estimation des émissions de CO2 provenant de la combustion des combustibles fossiles.

L'ESA s'appuie sur le savoir-faire de l'Empa pour équiper les satellites avec la technologie de mesure appropriée. "Nous avons pu donner à l'ESA diverses recommandations pour l'équipement des satellites", explique Gerrit Kuhlmann du département Pollution de l'air / Technologie environnementale de l'Empa. La difficulté pour déterminer les émissions de CO2 consiste à distinguer les signaux anthropiques des signaux biologiques. La respiration de la végétation provoque de fortes fluctuations dans la distribution du CO2. Le satellite doit donc être capable de les séparer des émissions d'origine humaine. L'idée : un appareil de mesure combiné qui détecte le CO2, mais aussi, en plus, le dioxyde d'azote (NO2). Parce que : "La combustion du charbon, du pétrole et du gaz produit non seulement du CO2 mais aussi des oxydes d'azote. Cependant, ces derniers ne sont pas produits pendant la "respiration" naturelle de la biosphère", explique Gerrit Kuhlmann. Un instrument supplémentaire pour le NO2 devrait donc être capable de "filtrer" les signaux anthropiques du CO2.

L'Empa simule des mesures par satellite

Afin de tester cette idée, Gerrit Kuhlmann et ses collaborateurs ont simulé la distribution des concentrations de CO2 et de NO2 pour l'année 2015 avec une résolution spatiale jamais atteinte auparavant. Les simulations élaborées ont été réalisées sur l'ordinateur à haute performance le plus rapide d'Europe, le "Piz Daint" du centre informatique suisse CSCS de Lugano. Ils ont pu montrer qu'une combinaison de mesures du CO2 et du NO2 donne des résultats meilleurs et plus fiables que si un seul appareil de mesure du CO2 avait été installé sur le satellite.

Pour l'instant, on ne sait pas encore combien de satellites doivent être mis en orbite, mais Gerrit Kuhlmann recommande d'en envoyer au moins trois. "Le problème est que le ciel est rarement sans nuages", dit Kuhlmann. En 2015, le ciel européen n'était exempt de nuages qu'un jour par semaine en moyenne. Plus la prise d'images par les satellites est régulièrement, plus la probabilité de voir les panaches de gaz d'échappement de sources individuelles telles que les villes et de pouvoir déterminer les émissions de celles-ci est grande. La recommandation relative à l'installation d'un instrument de mesure supplémentaire du NO2 a déjà été intégrée dans la planification des nouveaux satellites.