Les masques - oui ou non ?
En porter ou pas? La question des masques de protection suscite beaucoup de confusion en Suisse. Parmi la population, mais aussi parmi les expert·es.
La première question est : à quoi servent les masques ? La réponse est ... ce n'est pas si simple. Contre les gouttelettes, les masques de protection sont relativement efficaces. Lorsque j'éternue, un masque retient de nombreuses gouttelettes qui pourraient sinon s'envoler dans le visage d'une autre personne. Le masque protège aussi relativement bien contre les gouttelettes que je pourrais inhaler.
La situation est différente pour les aérosols. Les aérosols sont de minuscules particules dans l'air. Lorsque j'expire, il n'y a pas seulement de l'air pur des montagnes qui quitte mes poumons, mais également de minuscules particules (surtout des particules de poussière) que j'avais préalablement inhalées. Un masque filtre une partie de l'air que je respire - le reste passe par les fissures entre le masque et mon visage. Nous ne savons pas encore si les aérosols sont également porteurs du coronavirus, si on peut infecter quelqu'un comme ça. C'est le problème avec le Covid-19 : il y a beaucoup de choses que nous ne savons pas encore.
Les masques sont donc certainement d'une certaine utilité, mais on ne sait pas exactement dans quelle mesure. Dans de tels cas, les Suisses aiment dire «Utilisez-les, ça ne mange pas de pain» et jouer la sécurité. Néanmoins, le gouvernement fédéral n'a pas (encore) décrété le port du masque obligatoire. Pour deux raisons.
Premièrement, il n'y a pas une infinité de masques. Aujourd'hui déjà, environ 2 millions de masques sont utilisés chaque jour, principalement par des médecins, des infirmiers et infirmières, des sages-femmes, les soins à domicile et d'autres personnes qui en ont un besoin urgent. Si la population achète aussi des masques en masse, il est possible qu'il y ait une pénurie, et cela pourrait se terminer de façon dramatique. Des photos de médecins et d'infirmières et infirmiers qui doivent se protéger avec des pseudo-masques improvisés parce qu'ils et elles n'en ont pas de vrais, on ne veut surtout pas voir ça en Suisse !
Le deuxième problème est que les masques peuvent donner un faux sentiment de sécurité. Soudain, les gens sont moins enclins à garder leurs distances, à se laver les mains soigneusement, à se toucher le visage le moins possible ou à rester à la maison. L'hygiène et le fait de rester à la maison sont les moyens les plus sûrs et les plus efficaces contre la pandémie.
Avec ou sans obligation de porter le masque : il est certain que nous aurons besoin d'un grand nombre de masques. La Confédération prévoit que nous aurons besoin d'environ 135 millions de masques au cours de la pandémie - rien que pour le personnel médical. Si toute la population doit porter des masques, il nous en faudra même 360 millions ! Les chercheuses et chercheurs travaillent donc d'arrache-pied pour développer de nouveaux masques qui offriront une protection encore meilleure et pourront être utilisés plus longtemps.
A l'Empa, par exemple, le professeur René Rossi teste des revêtements anti-virus et des méthodes de stérilisation qui prolongent la durée de vie des masques. Des membranes spéciales imperméables au virus y sont également étudiées. René Rossi et son équipe travaillent actuellement pratiquement jour et nuit. Je leur souhaite beaucoup de succès !
L'article est paru à l'origine dans le SonntagsBlick.